lundi 10 mars 2008

Sam Cooke - Night Beat

Le confrère Dampremy causait il y a quelques temps sur sa page de ces albums cultes, de ces disques imparables, des tueries qui ont fabriqué leur époque et le futur musical de générations entières. Si lui parlait surtout cold wave et 80's, je répondrai ici par les premières notes paradoxalement gospel du véritable premier album soul : Sam Cooke' night beat. Ce disque fut une révolution pour beaucoup de raisons, d'abord parce que pour la première fois un ingénieur du son eut l'audace folle de pousser la voix du chanteur au dessus des arrangements et que d'une façon inédite l'organe pourtant alors déjà connu de Sam Cooke se laissa entendre d'une manière tout à fait incroyable. Le chanteur, alors artiste habitué à truster les charts, prit le risque de ralentir le tempo, de laisser la chanson, son corps, s'exprimer plus fondamentalement, il prit le risque d'ouvrir son coffre à des vibrations lentes, plus charnelles, plus sensuelles, il risqua cette mise à nue impensable avant cela. Ce disque inventa la soul, et bonheur, en fît aussi un album dîvinement réussi, ce qui aurait pu ne pas être forcément le cas.
C'est donc d'abord cette voix qui s'impose et puis ensuite cette succession de sans-fautes, gospel, blues, r'n'b, Sam Cooke enchaîne les compostions tradionnelles et les siennes propres toujours de cette façon caractéristique, épellant presque les mots qu'il nous semble alors pour la première fois réellement entendre, presque saisir. Toute cette tristesse du blues va éclater dans la soul music quelques années plus tard et accompagnés d'une avalanche de hits, les Marvin Gaye, Curtis Mayfield, Al Green, Sly Stone, Issac Hayes sont tous le produit de ce disque, de ce "Night Beat" qui changea une fois pour toute le rapport black au tempo, qui s'appropria la lenteur, ce tempo africain pour exprimer la chaleur des corps, la sexualité, les amourettes, mais aussi les tentions raciales, la lutte pour les droits civiques et toute cette merde raciste de l'époque .
Avec "Night Beat" Sam Cooke devient le premier artiste noir à faire beaucoup d'argent avec sa musique, il est la preuve pour tout une communauté que la réussite peut intervenir tout en choississant ses propres armes et même dans un système blanc. Melvin Van Peebles ne fera rien de bien différent quelques annèes plus tard avec son "Sweet Sweetback's baadassssss song", s'emparant de 23 millions de dollars de recette au box-office pour un investissement d'à peine 100 000 dollars, soit l'une des plus grosses plus-value d'Hollywood. Sam Cooke prouve tout ceci avec ce disque, il justifie qu'il y a un public noir au USA en 1963, qu'il consomme, qu'il a une culture propre et qu'il est capable de vivre en dehors des clous plantés par un régime blanc.
La soul music arriva en Amérique en 1963 avec un grand cou de pied dans la gueule, deux ans plus tard le ghetto de Watts brulait.

1 commentaire:

Mathieu Pierloot a dit…

Tu as mille fois raison, "Nightbeat" est un vrai chef d'oeuvre et un album culte parmi les cultissimes!

Dampremy