jeudi 30 avril 2009

Gabriel Schemoul - Ryoshi

La voilà la claque de l'année ! Gabriel Schemoul publie son premier album pour Cornélius avec ce "Ryoshi" et c'est un total enchantement. En fait, il fait partie d'ors et déjà de ces livres dont la qualité succinte du scénario le dispute à la toute maîtrise graphique du sujet. C'est beau et beau. Un conte sauvage dans un Japon inventé et rêvé - et qui rejoint un peu celui du tandem Micol / Adam du Contes du septième souffle - et dont la réalité se situe au delà de l'image représentée, dans la vérité crue de la situation exposée. Ryoshi est un pécheur qui rêve de théâtre. Il est touché par la grâce des dieux en tant que chasseur de poisson et sontinue inlassablement de remonter chaque jour des poissons dont le gigantisme se fait toujours un peu plus grand.

Monstre, il l'est par son apparence et ses facultés, mais monstre il devient aussi lorsqu'il joue devant sa petite fille, affublé d'un masque. Monstrueuses sont ses prises et monstrueux est son destin. Les dieux n'honore pas un homme sans dessein. C'est magnifiquement implaccable et conjugué à la virtuosité graphique de Schemoul (dont l'autre parution fruit de la collaboration avec Nancy Peña au scénario commence à me faire sérieusement de l'oeil), on atteint avec "Ryoshi" un sommet de la bande-dessinée. Réel coup de coeur, vite lu, mais tout aussi surement relu dans la foulée.






Ps : j'ai emprunté cet image sur le blog de Gabriel Schemoul en espérant qu'il ne m'en veuille pas, et ce blog est visible bien entendu en cliquant sur le titre de cet article.

Leela James - Let's do it again

Leela James est de retour quatre après "A change is gonna come", premier album soulful de la lady et forte du succès de celui-ci, s'était proprement faîte débarquée de chez Warner pour qui l'intérêt critique et public ne semble pas vouloir dire grand chose. Mais comprendra-t-on un jour les attentes des majors companies ? Je ne suis pas certain de le vouloir d'ailleurs.
Bref, la belle est de retour avec ce disque auto-produit, publié chez Shanachie et album contenant 100% de reprises. une chose est sure, Leela James chante toujours aussi bien, posant sa voix à la manière d'Aretha Franklin ou de Tina Turner, grinçant son timbre selon les inflexion du rythme et de la mesure. Sa voix est la première bonne surprise de "Let's do it again", elle est toujours là, elle a pris en maturité, en placement, on sent le groupe qui joue derrière et le tout s'harmonise au poil.
Côté track-listing, certains choix parraissent évident comme la reprise du "Clean up woman" de Betty Wright ou le "Simply beautiful" d'Al Green mais j'avoue qu'elle m'a surpris avec cette cover du "Miss you" des Stones dont le groove qu'elle y instaure résplendit un peu plus à chaque nouvelle écoute. Au final, il s'agit d'un disque qui s'intalle gentiment comme un classique du genre, résolument tourné vers le passé mais qui n'en oublie pas moins de faire résonner des basses profondes risquant, et c'est le pire qu'on lui souhaite, de faire se dandinner les foules des salles de concert frénétiquement.



Miss You - Leela James

jeudi 16 avril 2009

Archie SHepp - Phat jam in Milano

Archie Shepp est le saxophoniste type de la mixité jazz, ou plutôt de la mixture d'ailleurs. Toute sa carrière s'est constituée de collaborations, que ce soit la confrontation avec la soul et le funk sur "Attica blues", la musique nord-africaine sur "Blasé" et le "live at the pan-african festival", le jazz vocal sur le récent "Gemini" et sa collaboration avec la chanteuse Amina Claudine Myers, bref, presque autant de disques que de rencontres pour ce grand jazzman.
Et il y a un domaine dans lequel Archie Shepp a toujours versé, c'est celui du black talk, la parole noire de la Great Black Music, celle qu'on doit à Leroy Jones et Gil Scott-Heron. Alors il n'était pas très étonnant que de la rencontre avec Napoleon Maddox naisse cet enregistrement live réalisé à Milan l'été passé. Je rappelle pour le dernier rang que Napoleon Maddox est le emcee-beatboxeur-poète du combo IsWhat?! dont j'ai déjà parlé ici. Alors voilà nos deux artistes qui semblent vouloir travailler ensemble à une fusion de leurs univers respectifs. Enfin, c'est ce que j'en attendais sur le papier parce que la réalité du disque fini est toute autre.
Si la rencontre a bien eu lieue elle s'est surtout soldée par la reprise du répertoire déjà fortement rodé d'IsWhat?!, autrement dit par l'appropriation du travail de Jack Walker (saxophoniste chez IsWhat?!) par Archie Shepp et si l'intensité est effectivement au rendez-vous (que n'ai-je pas été à Milan l'été dernier..), qu'apportent donc ces interprétations aux originaux d'IsWhat?! ? J'en arrive même à trouver le "Kashmir" de Maddox plus réussi sur "The life we chose" que cette dernière. Alors oui, le disque est beau, Ahmid Drake aux percussions apporte un plus indéniable tant sa sensibilité organique se fait ici tendue mais que dire des deux saxophonistes également présents ? Oliver Lake et Cochemea Gastelum auraint du nourrir un feu autrement plus vif que celui qui proposé ! Sur "Ill Biz" notament, où est donc la déflagration sonore attendue ?
Reste le génie de Maddox micro en main qui se pose ici encore (mais sur son répertoire) comme l'un des alter-ego de l'autre black-poet du moment Saul Williams. Une micro décéption en somme, sauf si vous découvrez par ce disque la musique au combien enragée d'IsWhat?!.

mardi 14 avril 2009

Christophe Gaultier - Le Suédois

Librement adapté du roman de Stephen Crane, "Blue Hotel", "Le Suédois" emmène Christophe Gaultier chasser sur les terres de l'ouest américain, au teps des pionniers. Mais tout tient de l'ellipse dans ce livre, du Nebraska crépusculaire à peine évoqué par une ligne de chemin de fer et un hotel de passage minable. Le temps est à la tempête, les trois hommes descendus du train ont froid et brûlent d'envie de se rechauffer. Ce sera par l'alcool, le jeu, la chaleur humaine ?
Le Suédois est un fou, celui qui ne déparaillerait pas chez Dostoïevski, un fou qui enrage et emplit l'espace de ses résonnances absurdes, il fait naître la crainte et l'angoisse. Celles-ci posées il ne reste plus qu'à Christophe Gaultier de satisfaire à tout son savoir-faire crayon en main. Et le résultat est somptueux. Les faciès des personnages vivent comme jamais sous son trait, la tension devient perceptible, et quant finalement tout explose, on brûle de reprendre le livre depuis son début afin d'en savourer une nouvelle l'intensité des couleurs, la briéveté des dialogues et la qualité de la situation.
Un grand bouquin qui ne raconte pas grand-chose, mais qui maintient haut son désir d'étrangeté et revêt in fine les plus beaux atouts de la bande dessinée.

samedi 4 avril 2009

Marion Festraëts & Benjamin Bachelier - Dimitri Bogrov

Une heureuse surprise chez Bayou signée par deux inconnus (on me souffle que Marion Festraëts signerait quelques chroniques bd dans un grand hebdomadaire français et que Benjamin Bachelier aurait repris Le Leg de l'alchimiste abandonné par Tanquerelle), je dis bravo ! Dimitri Bogrov raconte une histoire d'amour entre deux jeunes gens brillants. L'action se passe à Kiev en 1911 dans le milieu bourgeois d'une part et les milieux d'extrème-gauche de l'autre, la rencontre de Dimitri Bogrov et Vera Raskovitch aboutira forcémment de façon tragique, mais qu'importe, l'amour semble seul guide ici.
En fait, ce qui frappe surtout dans cette histoire c'est l'absolue absence de fausse note. Tout est bon dans ce Dimitri Bogrov, des dialogues fins et bien rythmés aux couleurs changeantes et magnifiques de Benjamin Bachelier. Un vrai coup de coeur cet album, réellement.
Et si je n'en dis pas plus, c'est surtout pour ne gacher en rien l'univers qui se crée machinalement à la lecture de cet album, à vous de le découvrir.