jeudi 10 septembre 2009

Jean-Philippe Jaworski - Gagner la guerre

Il est des auteurs précieux dont j'essaye de parler ici et parmi cette catégorie il en est dont j'oublie d'aborder la critique, parfois par manque de temps, souvent par flemme, quelque fois parce que j'ose croire à un buzz inné ou en les quelques témoignages que j'ai pu postés sur les divers forums de la toile que je fréquente. Force est de constater que ça ne marche pas un brin. Il faut que je revois ma technique de promotion depuis sa base, à commencer donc par évoquer en ces pages les livres lus, adorés et dont j'aurais omis de signifier ici leurs grandes richesses. "Gagner la guerre" fait absolument partie de cette catégorie, c'est indéniablement un grand bouquin qui possède par la richesse de sa langue une forme assez rare dans ce type de littérature - que l'on appelle, et je le sais depuis peu : littérature de l'imaginaire, terme barbare qui regrouperait sous son vocable les pires errements de l'Heroic Fantasy à la science fiction la plus précise en passant par le fantastique et l'horreur-, bref, avec ce bouquin, Jaworski m'a tué, en avril dernier je crois.
Oui parce que dans mes-nouvelles-résolutions-à-moi-que-j'ai, j'ai la faiblesse de considérer que ne pas avoir retranscris ici les divers émois de lecteur que j'ai pu avoir dans l'année est un manquement sans pareil à une parole donnée et comme ce bouquin vaut le coup d'être lu, il doit certainement être de mon devoir de le faire partager. Hum, pas certain de cette dernière occurrence mais passons...
Pour remettre rapidement le contexte, "Gagner la guerre" prend sa source dans "Janua Vera", recueil de nouvelles paru chez les moutons electriques et qui avait pour le moins renverser la critique à l'époque, et à juste titre. Les nouvelles de "Janua Vera" se déroulaient toutes dans le Vieux Royaume et à des époques différentes, elles abordaient chacune un style et une problématique différents et contraignaient leur sujet en une forme bien particulière : de la chevallerie à la forme mythologique ou bien à la fantasy la plus pure, le lecteur voyageait rapidement en autant d'époques et toujours appuyé par les mots précis et la densité de la lanque de l'auteur, un réel bonheur.
Parmi les protagonistes rencontrés dans "Janua Vera", Don Benvenuto crevait littéralement le texte par l'extrême densité de sa psychologie et par le profil tout en opposition de son personnages. Sur le moment, je m'étais dit que Jaworski tenait là le personnage idéal à exploiter dans un roman et à croire que les voeux des humbles lecteurs finissent par être exaucés, l'auteur me (nous, lecteurs !) gratifia de 700 pages autour de ce fameux Don Benvenuto. Extase du lecteur.
Don Benvenuto est un assassin qui dans "Janua vera" se trouve piègé et qui finalement s'en sort par une admirable pirouette pour finir conseiller occulte du potentat local, le podestat leonide Ducatore, général longtemps en disgrâce mais qui, "pirouettant" à son tour, se retrouvait en fin de nouvelle avec le choix des armes et en leader proclamé de la République de Ciudalia. Or pour faire balancer les coeurs des riches marchants ainsi que ceux la noblesse ciudalienne, Ducatore a besoin de faire la guerre, d'abord pour en retirer un profit politique immédiat mais aussi afin d'assurer à la cité renaissance une aura incontestée sur la mer, la principale route marchante du Vieux Royaume.
Voilà pour le pitch de départ et je comprends bien qu'avec ce pain sec, votre faim ne se rassasie point. Mais il vous faut croire en la finesse de Jaworski qui intitule son roman : "Gagner la guerre", alors que celel-ci est déjà gagnée quand le récit de don Benvenuto s'engage. Gagner la guerre, c'est rentrer au port en vainqueur et s'assurer finalement que la victoire est acquise sur les nombreux fronts qu'elle aavit si intimement éveillés. Politique et par conséquent intrigues et luttes d'influence vont animer les roman sur 700 pages sous la magnifique plume de don Benvenuto qui nous relate à la première personne le récit de ses aventures et l'on verra assurémeent que ce témoignage écrit est d'un importance capitale pour un maître assassin.
Je ne m'étends pas sur l'histoire à proprement parler de peur d'en divulguer le sel de l'intriguer, mais sachez que Benvenuto est un indicidu torve et retors, dirigé par un podestat du même accabit et que ces deux-là vont se livrer une guerre magnifique et pourtant initiée assez simplement par Jaworki dans une pirouette scénaristique auquelle on ne croit pas une seconde. MAis l'essentiel n'est pas là, il repose dans la qualité du texte et dans la précision de l'écriture, le vocabulaire recherché de l'auteur, parfois un peu ampoulé il est vrai, mais c'est finalement un vraiment bonheur de lire un texte d'une force aussi naturelle et sous la plume d'un écrivain français dans un domaine que l'on croyait perdu aux auteurs héxagonaux au profit des anglo-saxons depusi belle lurette. Que nenni, Jaworski, mais aussi Stéphane Beauverger, Alain Damasio et Laurent Kloetzer sont là, et ils n'attendent que votre bienveillance.
"je n'ai jamais aimé la mer
Croyez-moi, les paltoquets qui se gargarisent sur la beauté des flots, ils n'ont jamais posé le pied sur une galère. La mer, ça secoue comme une rosse mal débourrée, ça crache et ça gifle comme une catin acariâtre, ça se soulève et ça retombe comme un tombereau sur une ormière ; et c'est plus gras et plus limoneux que le pot d'aisance de feu ma grand-maman. Beauté des horizons changeants et souffle du grand large ? Foutiases ! La mer, c'est votre cuite la plus calamiteuse, en pire et sans l'ivresse".
PS : Je glisse juste un rapide mot à propos de l'éditeur, Les Moutons électriques, dont le boulot est remarqauble et auquel je souhaite vraiment de faire un succès avec ce bouquin, même si la situation des ventes en librairie n'apparait pas des plus reluisante dans ce secteur en particulier, surtout si la couverture n'affiche pas une guerrière aux seins nus. Bref, lisez les Moutons, c'est bon pour eux et bon pour vous !

Aucun commentaire: