mardi 15 septembre 2009

Michael Flynn - Eifelheim

Sans hésitation aucune Ailleurs & Demain mériterait le titre de pire couverture de l'année 2008, peut-être même pourrait-on envisager de concourir sur la décennie entière tellement cette illustration infecte jette un discrédit absolu sur l'oeuvre qu'elle est au contraire sensée souligner.
On aurait chercher à ce que le public -déjà fort léger- des amateurs de SF se détourne d'Eifelheim qu'on n'aurait pu s'y prendre autrement mieux. A la limite, illustrativement parlant, faire pire, c'était faire mieux.
Passée cette gêne intrinsèque à se saisir de l'ouvrage dans votre librairie habituelle - oui, parce que bon, l'achat de sous-littérature aliénisée n'est pas le quotidien de votre serviteur -, il faut absolument au lecteur se rendre à l'évidence, ce Michael Flynn n'est pas banal, et son livre non plus.
Il y a deux récit dans "Eifelheim", l'un prend cadre au 21ème siècle de façon à peu près contemporaine tandis que l'autre se déroule au 14ème siècle durant la terrible épidémie de peste noire qui ravagea l'Europe entière. Deux récits pour un propos : qu'arrive-t-il de si extraordinnaire à Eifelheim, petite bourgade allemande de la forêt noire pour qu'elle disparaisse de la carte. C'est la question que se pose Tom, cliologue et donc spécialiste de l'interactivité historistique entre les cités humaines et apte, grâce à un puissant calculateur de démontrer qu'à l'endroit où logiquement Eifelheim devrait se trouver, on n'y trouve rien. Voilà pour les intérrogations contempraines de Tom, et tandis qu'il cherche à comprendre le phénomène, Michael Flynn nous fait le récit quasiment jour par jour de la chute du village en se concentrant sur les agissements du père Dietrich, un homme cultivé que l'apparition d'êtres étranges, tombés du ciel, va bouleversé indélébilement. Et on peut le comprendre. Des sauterelles géantes, douées de raison, apparues à bord d'un vaisseau de métal, violants mais cultivés, irrascibles mais pugnaces, capables de comprendre la foi en le Sauveur mais aussi adepte de preceptes païens. En un mot complétement désoeuvrés et isolés a priori loin de leur monde.
C'est là la force du récit de Michael Flynn, on pourrait croire à une réminiscence d'un magazine pulp des années 30 mais non, il réussit à nous faire venir parmi les aliens, à nous faire croire aux intérrogations de Dietrich. Alors, les questionnements abondent, mystiques mais aussi scientifiques : bien sûr le soleil troune autour de la terre, nous sentirions le vent de la vitesse de déplacement de notre planète si l'inverse se vérifiait, évidemment on peut croire à la force de la poudre noire, peut^-être même à la capacité de contraindre les forces electriques des éclairs, mais nous n'oublions pas, à l'instar des habitants d'Eifelheim que Jesus Christ est notre sauveur, qu'il est celui par lequel arrivera la salut. Aux aliens de croire, ou pas, à cette révélation.
Formidable quête de sens, le récit de Michael Flynn intérroge notre rapport à l'inconnu et la divînité, notre capacité à comprendre la différence et la particularité, l'individu et le groupe. C'est fort, rondement mené, certains dialogues font immédiatement penser à la controverse de Valladolid qui questionnait l'humanité des indiens d'Amérique et oui, résolument, les interrogations posées là sonnent longtemps à mesure que la lecture du roman se déroule.
J'aurais un rapproche à formuler - en sus de cette hideuse converture-, la langue de michael Flynn n'est pas des plus affriolante, elle a la manière d'un scientifique énonçant un chapelet de faits et n'emporte guère plus loin que celle d'un thésard. De même que ces aliens sont par trop proches de nous contemporains, ils utilisent une technologie sans doute trop semblables à la notre, mais passons... Autre chose, l'intérêt du récit contemporain est limité lui aussi, les personnages assez caricaturaux et par cela en totale inadéquation avec ceux du Moyen-Age germanique. Dommage, l'auteur aurait sans doute pu s'en dispenser. Reste un livre d'une incontestable qualité et qui renvoit loin tous les "aspi"-auteurs qui surabondent dans cette littérature de genre. L'alien ici est indéniablement intélligent et ça fait du bien de le lire.

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